L’occupation, sans titre ni droit, de cette propriété privée est l’œuvre de « Rockin’Squat » ASBL. Au nom du « droit au logement », les activistes de cette association dont les méthodes sont à la limite de la légalité s’est assignée pour « mission » d’occuper les « immeubles à l’abandon » afin d’y loger des « sans logis ». Situé aux numéros 30-32 du Boulevard du Souverain, dans la commune bruxelloise de Watermael-Boitsfort, cet immeuble de la Gécamines est inoccupé mais pas « abandonné ». Vendredi 30 avril, les deux parties vont s’affronter devant le tribunal de paix.
C’est un « lanceur d’alerte » bruxellois qui a prévenu, mercredi 28 avril, l’auteur de ces lignes. Son message peut être résumé comme suit: « Plusieurs dizaines de personnes étrangères à la Gécamines occupent depuis deux semaines les anciens bureaux de cette entreprise d’Etat congolais. Il y a plusieurs familles avec des enfants à bas âge. La Gécamines a requis, sans succès, l’intervention des autorités communales dont la police pour obtenir l’expulsion des intrus ». On dénombrerait plusieurs familles originaires du Congo-Kinshasa.
Après quelques contacts téléphoniques avec des sources proches du dossier, il se confirme que le bâtiment abritant la représentation de la Gécamines à Bruxelles est bel et bien occupé. L’occupation ou l’invasion serait intervenue, début avril, durant le long week-end de Pâques. Des individus non-identifiés – usant des méthodes dignes d’un « commando » bien renseigné – ont cassé les portes de derrière avant de remplacer les serrures jusqu’à à l’entrée principale. « Un des administrateurs de cette association avait téléphoné à la Gécamines », confie, une des sources. Il s’agit d’un certain Daibes.
Depuis une année, ce prestigieux immeuble est inoccupé. La Gécamines a pris en location plusieurs bureaux dans un bâtiment voisin. « Le siège de la Gécamines à Bruxelles ne répondait plus aux normes actuelles. Le système de chauffage et l’ascenseur sont devenus défectueux, raconte un cadre. C’est ainsi que la haute direction à Lubumbashi avait levé au moins deux options ». La première consistait à mettre les bureaux en location. La seconde, la rénovation du bâtiment. Il semble que la rénovation se serait révélée plus dispendieuse que l’achat d’une nouvelle bâtisse.
Aux dernières nouvelles, on apprenait que des experts auraient décelé la présence de l’amiante dans les locaux au nr 30-32 boulevard du Souverain. « C’est une des raisons qui avaient incité la représentation de la Gécamines à Bruxelles d’aménager ailleurs en attendant une opération de désamiantage », confie une source.
Ceux des agents de la Gécamines qui ont pris langue avec les animateurs de l’association précitée déplorent une « certaine arrogance ». « Et pourtant, commente un cadre, l’immeuble de la Gécamines ne peut être considéré comme un bien abandonné. La preuve est que toutes nos archives et tous les mobiliers sont toujours en place. Les factures d’eau, d’électricité et du gaz sont mensuellement payés ».
Il se confirme que les agents de la Gécamines-Bruxelles n’ont plus la possibilité d’accéder à l’intérieur de ce bâtiment. Plus surprenant, on apprenait mercredi que les « occupants » de l’immeuble, estimés à une cinquantaine, serait en train de faire des travaux pour installer plusieurs douches.
Après une descente au 30-32 boulevard du Souverain, un contact téléphonique a pu s’établir avec une certaine Rim Idmiloud qui serait la présidente de la fameuse ASBL. Le ton est volontairement désinvolte: « Je n’ai rien à foutre que la propriété soit un droit sacré ou pas. Le bâtiment était à l’abandon. Il y a des Congolais sans papiers qui se trouvent en Belgique. Il s’agit des familles qui se vivaient dans la rue. Ils sont maintenant au chaud. Ces Congolais sont des victimes de la mauvaise gestion de votre pays ». Comment ont-ils pu avoir accès dans un bâtiment fermé? « Nous ne savons pas qui avait cassé les portes. Nous avons reçu les clés et nous sommes entrés dans l’immeuble », dit-elle. La dame Idmiloud assure que son association aurait demandé à la représentation de la Gécamines de lui faire parvenir les factures d’eau et d’électricité. Outrecuidance?
C’est depuis le début des années 80 que la Gécamines avait racheté ce prestigieux immeuble au richissime italien Carlo de Benedetti. En juin 2018, des informations parcellaires laissaient entendre que le président du Conseil d’administration de la Gécamines, l’inamovible Albert Yuma Mulimbi, envisageait de mettre en vente plusieurs propriétés de la Gécamines dont l’immeuble sous examen. Coût: 6 millions €. La société Unibra s.a. fut un de candidats acquéreurs.
Si l’article 16 de la Constitution belge reconnait que « nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique (…)« , l’article 23, lui, édicte que « chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine » impliquant notamment « le droit au logement décent ». Rockin’Squat ASBL dit fonder son « combat » sur le « droit au logement ».
La Gécamines et les activistes de « Rockin’Squat ASBL » sont attendus le vendredi 30 avril devant le tribunal de paix. Aux dernières nouvelles, la partie défenderesse a demandé le report « pour permettre à ses avocats de peaufiner le dossier ». L’audience est fixée le mardi 14 mai au Tribunal de paix à Etterbeek. Affaire à suivre.
Baudouin Amba Wetshi, article complété le vendredi 30 mai 2021