Une polémique importune enfle les débats politiques autour de l’examen de la motion de censure contre le Gouvernement du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba.
Le Bureau d’âge est-il habilité de faire examiner une motion de censure au cours de cette session extraordinaire convoquée en vue de l’élection et de l’installation du bureau définitif? Autrement dit, ce bureau peut-il mettre en cause un gouvernement installé par un bureau définitif?
Le Premier ministre peut-il refuser de se présenter devant l’Assemblée nationale?
Nos chers compatriotes du FCC, inscrits prématurément dans la prestigieuse école d’apprentissage de l’Opposition républicaine, éprouveraient une aptitude d’apprenants studieux en retenant ce qui suit:
- Dans son Arrêt R.Const. 1438 rendu le 15 décembre 2020, la Cour constitutionnelle statue que « l’habilitation à gérer les affaires courantes de l’Assemblée nationale soit donnée au bureau d’âge qui pourra ainsi convoquer une session extraordinaire non seulement pour vider le seul cas qui lui reste et organiser l’élection du nouveau bureau définitif, mais aussi, au vu de l’urgence, exercer le contrôle prévu à l’article 100 de la Constitution. En effet, l’Assemblée nationale ne perd aucune de ses prérogatives constitutionnelles du fait de la déchéance des membres de son bureau » (Voir Huitième feuillet R.Const.1438). Par ailleurs, ce n’est pas le bureau d’âge qui met en cause le Gouvernement. Ce sont plutôt les 301 Députés nationaux signataires de cette motion qui engagent la responsabilité du Chef du Gouvernement conformément aux dispositions pertinentes de la Constitution et du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
- La compétence de connaître ou d’examiner une motion de censure n’est dévolue particulièrement ni à un bureau définitif ni à un bureau provisoire ou d’âge. Cette compétence est dévolue à l’Assemblée plénière qui est l’organe suprême de l’Assemblée nationale. C’est l’Assemblée plénière qui, en vertu des dispositions de l’Article 23 point 26 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, est compétente pour délibérer toutes les matières relevant des pouvoirs et attributions de l’Assemblée nationale notamment mettre en cause la responsabilité du Gouvernement ou d’un de ses membres par le vote d’une motion de censure ou de défiance.
- Le Gouvernement est responsable devant l’Assemblée nationale suivant l’article 91 et dans les conditions prévues aux articles 90, 100, 146 et 147 de la Constitution. Le devoir de redevabilité oblige donc le Premier ministre de répondre à la motion de censure lui signifiée régulièrement, en bonne et due forme. Au fait, en vertu du principe cardinal de présomption d’innocence, la présence du Chef du Gouvernement est un privilège lui accordé afin qu’il excipe ses moyens de défense. Son refus de se présenter constitue non seulement un acte de renonciation à ce droit mais aussi et surtout un outrage envers l’Assemblée nationale qui est une infraction pénale contre l’ordre public à l’instar de la rébellion (Cfr. Code pénal congolais, Livre II, Titre IV, Section II). Toutefois, l’article 199 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale précise la procédure requise en cas de refus de l’interpellé de se présenter sans motif légitime. Dans ce cas, l’Assemblée plénière prendra acte du refus du Chef du Gouvernement, approuvera la déchéance du Gouvernement et instruira le bureau d’en adresser un rapport circonstancié au Président de la République. Ce dernier n’aura d’autre choix que de prendre acte de la démission de facto du Gouvernement.
A la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de soutenir que les diligences portées à la présente motion de censure contre le Gouvernement du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba ne constituent nullement une contrefaçon de l’Etat de droit. Bien au contraire, il est indiqué de recommander à nos compatriotes du FCC d’obvier à tout juridisme éthéré et obséquieux.
Honorable Chérubin OKENDE