Néhémie Mwilanya: « La coalition Fcc-Cach est morte, vive la cohabitation! »

Au cours d’un point de presse qu’il a animé, lundi 7 décembre, à Kinshasa, Néhémie Mwilanya Wilondja, coordonnateur de la mouvance kabiliste dite « Front commun pour le Congo » (Fcc)  a déclaré que cette plateforme « a pris acte » de la décision du Président Felix Tshisekedi Tshilombo de « mettre fin à la coalition Fcc-Cach ». L’ancien directeur de cabinet de « Joseph Kabila » s’est réjoui de voir le Fcc trôner à la tête d’un exécutif homogène. Aussi, a-t-il invité les personnalités étiquetées « Cap pour le Changement » (Cach) de prendre leurs cliques et leurs claques et de quitter le gouvernement tant au niveau national que provincial. Le juriste « Néhémie » a éludé un détail. A savoir que l’ordonnance n°19/056 du 20 mai 2019 portant nomination de l’actuel Premier ministre s’appuie notamment sur l’accord de coalition précitée en guise de « base juridique »…

La patronne de la Mission onusienne au Congo-Kin, Leila Zerrougui

« La Monusco déplore des tensions politiques accrues et une crise persistante de protection des civils dans l’Est du pays ». C’est la substance de l’intervention faite, lundi 7 décembre, devant le Conseil de sécurité à New York, par Leila Zerrougi, représentante spéciale du secrétaire générale de l’Onu et Cheffe de la Monusco. Réputée pour sa duplicité, la « communauté internationale » suit avec préoccupation les dernières évolutions de la situation politique au Congo-Kinshasa.

Oui! La République (mal nommée) démocratique du Congo fait face à des tensions politiques provoquées par une minorité d’individus qui considère le pays comme le « bien personnel » d’un clan. Cette minorité a pris en otage le destin de tout un peuple.

UNE PSEUDO-ALTERNANCE

Vingt-trois mois après la « passation de pouvoir » qualifiée pompeusement de « civilisée » entre « Joseph Kabila » et son successeur Felix Tshisekedi, on assiste à une grave crise de confiance entre les deux hommes. Sauf rebondissement miraculeux, la rupture parait, cette fois, irrémédiable. Au commencement était une pseudo-alternance.

Dans le « Lexique de droit constitutionnel » publié en 2003 aux éditions de la presse universitaire de France (PUF), le vocable « alternance » est défini comme « mode de dévolution du pouvoir dans une démocratie consistant dans le remplacement d’une majorité politique par une autre, au moyen de l’exercice du droit de vote ». On retiendra que l’alternance est un mécanisme propre aux régimes démocratiques où le pouvoir d’Etat n’est nullement considéré comme un privilège. Mais bien un service à rendre à la collectivité.

Le 24 janvier 2019, « Kabila » qui a dirigé le Congo-Kinshasa en « monarque républicain », dix-huit années durant, était contraint de « céder » le fauteuil présidentiel. Le changement de majorité, lui, n’a pas eu lieu. La terre entière s’est réjouie de voir un potentat africain « quitter le pouvoir » sans devoir faire couler du sang. En fait, le successeur de Mzee, devenu « sénateur à vie », n’est jamais parti. L’homme se croit providentiel. Ses partisans ne cessent de lui susurrer à l’oreille que « le peuple congolais espère son retour au sommet de l’Etat en 2023 ». Et ce malgré un bilan économique et social effrayant. Inutile de parler de la sécurité des personnes et des biens.

Cérémonie d’investiture du président Felix Tshisekedi Tshilombo, le 24 janvier 2019

Dans son allocution prononcée dimanche 6 décembre en conclusion des « consultations » qu’il avait lancées le 2 novembre, Felix Tshisekedi a relevé les déconvenues endurées. Et ce « durant deux années d’efforts inlassables, de patience et d’abnégation pour préserver l’essentiel au sein de la coalition ». Il a fini par réaliser que le Fcc s’intéresse au pouvoir juste pour le pouvoir. Pour lui, il est temps de rompre les amarres: la coalition est morte. Il va nommer un Informateur. Mission: identifier une nouvelle coalition. Ce scenario ne serait sans doute pas arriver si « Kabila » s’était abstenu de passer son temps à savonner la planche à son successeur.

« ANNONCES INCONSTITUTIONNELLES »

L’annonce de la résiliation de l’accord de coalition Fcc-Cach décidée par « Fatshi » a été accueillie au sein de la mouvance kabiliste comme une déclaration de guerre. Lundi 7 décembre, le coordonnateur « Néhémie » faisait une « tête d’enterrement ». Le « professeur » a sorti l’artillerie lourde pour pilonner les positions du Cach. A maintes reprises, il dénonce en termes véhéments la « violation de la Constitution » par Cach sans citer à l’appui une disposition constitutionnelle.

On retiendra que la mouvance kabiliste se dit « nullement concerné par les annonces inconstitutionnelles » du chef de l’Etat. On retiendra également qu’elle les « rejette en bloc ». On retiendra enfin que le Fcc manifeste un « soutien ferme » non seulement au Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba mais aussi à « son » gouvernement. Sans omettre les présidents des Bureaux de l’Assemblée nationale (Jeanine Mabunda) et du Sénat (Alexis Thambwe Mwamba).

En fait, le Fcc qui n’est nullement un parti politique dans le sens énoncé dans l’article 6-3 de la Constitution, dénie au chef de l’Etat le pouvoir de nommer un Informateur chargé d’identifier une coalition majoritaire au sein de la chambre basse du Parlement. Prétexte invoqué: une telle démarche serait prohibée par la Constitution « en cours de législature ». Problème: le Fcc omet d’indiquer la disposition constitutionnelle en question.

L’EX-RAIS INVITÉ A DIRE « SA PART DE VÉRITÉ »

Une réunion du Conseil des ministres à Kinshasa

Le Fcc invite les membres du gouvernement étiquetés Cach a quitté le gouvernement central et les exécutifs provinciaux. Les caciques de la mouvance kabiliste feignent d’ignorer que l’accord dénoncer par le président Felix Tshisekedi est juridiquement un contrat entre deux ou plusieurs personnes. Dès lors qu’une des parties résilie la convention, tout l’édifice s’écroule. Le Premier ministre nommé en référence notamment dudit accord ne pourrait survivre. En cas de « résistance » de sa part, le Président de la République pourrait « débrancher la prise » par le « retrait » de l’ordonnance nommant le chef du gouvernement.

Lors de son point de presse, le coordonnateur « Néhémie » a indiqué que le Fcc va demander à son « autorité morale de s’exprimer pour dire sa part de vérité afin de fixer l’opinion ». L’ex-raïs va-t-il (enfin) battre sa coulpe en avouant notamment le tripatouillage des résultats électoraux avec son homme lige, Corneille Nanga? Va-t-il avouer que pendant que les centrales électorales locales étaient occupées à compiler les bulletins de vote, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) égrenait, depuis Kinshasa, les noms des « élus » aux élections législatives?

On espère que les « mauvais génies » qui continue à graviter autour de l’ex-président « Kabila » ont bien pesé les avantages et les inconvénients de cette exposition hasardeuse de leur « gourou ». La loi n°18/021 du 26 juillet 2018 portant statut d’anciens Présidents de la République prévoit des droits mais aussi des devoirs. L’article 5 de ce texte astreint le bénéficiaire à une « obligation générale de réserve, de dignité, de patriotisme et de loyauté envers l’Etat ». N’en déplaise au coordonnateur Mwilanya, il n’est pas sûr que la coalition en voie de disparition engendre automatiquement la « cohabitation ».

 

Baudouin Amba Wetshi

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