Congo-Kin: Le torchon brûle entre le ministre de l’Intérieur et la DGM

En « visite d’inspection », mercredi 18 novembre, dans un « lieu de détention illégale » de la DGM (Direction Générale de Migration), le ministre de l’Intérieur et Sécurité, Gilbert Kankonde Malamba a ordonné la fermeture dudit lieu. On apprenait, samedi 21, la suspension du directeur général de cet organisme public qui joue un rôle analogue à celui de l’Office des étrangers en Belgique.

Entre le ministre de l’Intérieur Gilbert Kankonde Malamba (UDPS) et le directeur général de la DGM, Roland Kashwantale, c’est presque la « guerre ». D’aucuns diront que l’on va assister à un affrontement « pot de fer » contre  « pot de terre ». D’autres pourraient objecter que Goliath ne gagne pas toujours.

De quoi s’agit-il?

Mercredi 18 novembre, le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur et la sécurité a effectué une « visite d’inspection » dans un bâtiment dépendant de la DGM dans la commune kinoise de la Gombe. L’illustre visiteur dit avoir découvert un « cachot » où des personnes étaient détenues non seulement « dans des conditions inhumaines » mais surtout « en violation » de la décision du Président de la République ordonnant la fermeture des « lieux de détention illégale ».

A la fin de son « inspection », le « VPM », comme disent les confrères kinois, a instruit la direction de la DGM de procéder illico presto à la fermeture dudit lieu de détention. C’est l’incrédulité. Dans sa dépêche datée du 18 novembre, l’Agence congolaise de presse rapporte les propos de Papy Mbuyi, le numéro deux de la DGM.

On apprend que le « DGA » a contredit le ministre de tutelle. Selon lui, le bâtiment mis en cause sert non pas de « cachot » mais plutôt de « centre de transit » où sont « retenus » les étrangers en situation irrégulière sur le territoire national. Et ce jusqu’à la reconduction de ces derniers aux frontières. A en croire le communicant de la DGM, c’est un lieu connu des ambassades étrangères accréditées à Kinshasa. Et que des diplomates ont l’habitude de venir dans le lieu querellé pour s’enquérir de la situation de leurs compatriotes.

On imagine que pour la direction de la DGM, le ministre de l’Intérieur s’est livré à une « appréciation erronée » de la situation. Il n’est donc pas question d’obtempérer à un ordre irrationnel. Ce qui devait arriver arriva.

AUTORITARISME?

Roland Kashwantale, directeur générale de la DGM

Samedi 21, le ministre de l’Intérieur a signé un arrêté portant suspension du directeur général Roland Kashwantale. Motif: « insubordination ». Est-ce pour avoir contredit le ministre ou pour avoir fait dire haut et fort que la DGM n’entretient aucun cachot?

Une « colère sourde » monte dans certains milieux de ce « service ». A tort ou à raison, le ministre Kankonde est accusé d’avoir ébréché l’image de la DGM en faisant des déclarations qui ont été mal interprétées par des médias.

Selon une source kinoise, le ministre de l’Intérieur n’était pas en visite d’inspection. « Le ministre Gilbert Kankonde était venu spécialement à la recherche de deux sujets indiens qui y étaient retenus pour séjour illégal ». A en croire cette source, les deux concitoyens de Mahatma Gandhi étaient titulaires de simple visa de voyage. « Ces deux Indiens se livraient déjà à des activités commerciales sans être titulaires du visa d’établissement encore moins celui de travail, ajoute-elle. Les Congolais peuvent-ils se comporter ainsi en Inde? Que vient faire un membre du gouvernement dans cette affaire qui rentre dans les compétences de la DGM? Le ministre doit protéger les organismes placés sous sa tutelle et non jeter leur réputation en pâture. Ces deux individus étaient en séjour illégal c’est pourquoi ils ont été retenus en attendant leur reconduction à la frontière ».

Aux termes du décret-loi n°002/2003 du 11 janvier 2003 portant création et organisation de la Direction générale de migration, celle-ci exerce notamment les missions de police des étrangers et des frontières. La DGM est, par ailleurs, chargée d’exécuter les lois et règlements sur l’immigration et l’émigration sur le sol congolais.

La DGM étant régie par la loi n°16/013 du 15 juillet 2016 portant statut des agents de carrière des services publics de l’Etat, des observateurs déplorent la « brutalité » de la décision du ministre de l’Intérieur. Une décision qui, disent-ils, méconnait l’article 41 dudit texte. « En suspendant le DG Kashwantale sans avoir constaté au préalable des indices suffisamment graves présumant l’existence d’une faute dans son chef, le ministre Kankonde a brillé par un certain autoritarisme », résume, pour sa part, un cadre de la DGM joint dans la soirée à Kinshasa.

 

Baudouin Amba Wetshi

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